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Résurrection, sibyllisme et parthénogénèse: La Sorcière de Jules Michelet et la nouvelle historiographie

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For 1862’s La Sorcière, Jules Michelet’s seminal study of the history of witchcraft and witch-trials in France, the author adopts a controversial mode of writing situated somewhere between the style of folktales and that of traditional historiographic scholarship. Michelet describes three powers of the witch (resurrection, prophecy, and parthenogenesis) which, when considered in relation to the author’s theory of the imaginary, are also the powers of the historiographer. Of the three, it is the idea of parthenogenesis that proves most useful to understanding the stylistic hybridity of the text. The term is borrowed by Michelet from nineteenth-century naturalist science, but is transformed in La Sorcière into a symbol of the creative imagination: the poiesis of the writer and the autopoiesis of French society

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Notes

  1. “Maintenant voici mon péché où m’attend la critique. Dans cette longue analyse historique et morale de la création de la Sorcière jusqu’en 1300, plutôt que de trainer dans les explications prolixes, j’ai pris souvent un petit fil biographique et dramatique, la vie d’une même femme pendant trois cents ans.―Et cela (notez bien) dans six ou sept chapitres seulement” (vol. II, p. 212).

  2. Selon Michelet, un trop grand nombre d’historiens “ne représentent que la vie extérieure des peuples, leurs guerres, leurs traités, c’est-à-dire la partie moins utile de leur histoire” (1825, p. 76).

  3. Dans “Michelet, le philosophe historien,” Aurélien Aramini fournit un excellent survol de l’influence de Cousin sur le jeune Michelet, sa façon de comprendre l’histoire et de l’écrire. Il cite l’extrait suivant de Cousin, un fragment intitulé “Philosophie de l’histoire,” comme ayant été particulièrement marquant pour le jeune Michelet. Cousin écrit que: “L’histoire explique et elle peint. Mais quand elle aura expliqué et quand elle aura peint toutes les époques de l’humanité les unes après les autres […] ces leçons n’auront reproduit qu’une succession de choses particulières […] Vous avez fait couler sous mes yeux le fleuve du passé; vous m’avez fait connaître les pays qu’il a déjà traversés […] Mais quelle est donc la nature du mouvement qui l’emporte et quel est le but où il tend? […] Ses mouvements n’ont-ils pas des lois? Son existence même n’a-t-elle point sa raison? Voilà ce que je veux savoir, ce qu’il m’importe de savoir; car autrement je ne sais rien” (2016, pp. 16–17).

  4. Michelet affirme à la fin de L’Introduction à l’histoire universelle que “les grandes révolutions ont d’avance leurs symboles prophétiques” et que “quiconque veut connaître les destinées du genre humain” doit commencer par l’étude des peuples passés, particulièrement des Romains: “C’est en nous plaçant au sommet du Capitole que nous embrasserons, du double regard de Janus, et le monde ancien qui s’y termine, et le monde moderne, que notre patrie conduit désormais dans la route mystérieuse de l’avenir” (1831, p. 416).

  5. La culmination de la sorcellerie (à savoir, l’avènement de la médecine et des sciences modernes) est décrite par Michelet en termes expressément révolutionnaires vers la fin du second volume. “Nommez-moi une science qui n’ait pas été révolte,” dit-il (vol. II, p. 200). “La médecine, surtout, c’est le vrai satanisme, une révolte contre la maladie, le fléau mérité de Dieu” (vol. II, p. 202). Il s’agit d’une autre révolte de la liberté et de l’agentivité contre le fatalisme, ici la conception ecclésiastique de la maladie selon laquelle il faudrait se résigner à la volonté de Dieu. Celle-ci, au lieu de guérir les malades, leur dit simplement: “Vous avez pêché, et Dieu vous afflige. Remerciez; c’est autant de moins sur les peines de l’autre vie. Résignez-vous, souffrez, mourez” (vol. I, p. 103).

  6. Les notes, écrites en novembre de 1863, sont reproduites dans le Journal de Michelet (1828–1874, vol. III, p. 638).

  7. Michelet explique qu’au début du quatorzième siècle, lorsque les familles commencent à vivre dans des maisons séparées, la femme se voit pour la première fois seule. “Celle-ci n’a d’ami que ses songes,” dit-il (vol. I, p. 41).

  8. Michelet décrit souvent la poïésis en termes reproductifs de conception et d’accouchement. Selon Paul Bénichou, il y aurait chez Michelet une théorie artistique de la fécondation de la matière par l’esprit (2004, p. 938). Théorie visible dans le passage suivant de l’Histoire de France, qui traite des pierres taillées des cathédrales, et où il est notamment question de transsubstantiation (le passage de l’esprit vers la matière, ou de l’imaginaire vers le réel): “il faudra toujours adorer en ces monumens [sic] la victoire de la moralité humaine. […] Incarnation, passion, deux mots identiques, qui s’expliquent par un troisième: transsubstantiation. À trois degrés différens, c’est la lutte, l’hymen, l’identification des deux substances: dramatique et douloureux hymen dans lequel l’esprit descend et la matière souffre” (1833, p. 660).

  9. En fait, le livre des Origines de Michelet est entrepris originellement comme traduction des Antiquités du droit allemand de Grimm.

  10. “Si l’archéologue décide sur la forme de telle ogive qu’un monument est de tel temps, avec bien plus de certitude la psychologie historique peut montrer que tel fait moral est de tel siècle, et non d’un autre; que telle idée, telle passion, impossible aux temps plus anciens, impossible aux âges récents, fut exactement de tel âge” (vol. II, p. 212).

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Covelo, R. Résurrection, sibyllisme et parthénogénèse: La Sorcière de Jules Michelet et la nouvelle historiographie. Neophilologus 103, 323–334 (2019). https://doi.org/10.1007/s11061-018-09595-1

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